J'ai trop de temps libre en ce moment. C'est pas bon pour la tête d'avoir trop de temps libre, ça fait réfléchir. Même si je passe un certain nombre d'heure à ne penser à rien (quoi qu'en dise Betty), j'ai encore trop de temps pour penser. Pour penser au quart de seconde entre les gens.
C'est cette hésitation, cet instant avant la parole qui contient tellement de choses à laquelle je fais référence. Parfois on a envie de dire quelque chose, de méchant, de gentil,d'important, de futile, mais en une quart de seconde, le cerveau a analysé tout ça, et il dit stop. Alors il ne dit rien. Ou il dit quelque chose d'autre, de faux, d'artificiel, qui cache maladroitement un instant de spontanéité refoulée et censurée. Qu'est-ce qui se passerait si on supprimait ce quart de seconde d'analyse, d'examen de nos propres pensées ? Est-ce que le monde serait plus facile à vivre, ou au contraire plus difficile, plus rude ?
Je l'appelle le "quart de seconde entre les gens" parce qu'il se dresse entre nous et nous sépare, nous éloigne, il fait de votre interlocuteur un ennemi à qui on ne peut pas tout dire, il vous transforme en machine à politiquement correct. Big brother is not watching you, Big brother is in your mind. Alors bien sur, il y a des hésitations qui vous évitent aussi de faire du mal, ou de provoquer des choses très peu agréables, pour le moins. Mais si c'est le prix à payer pour cette inégalable sensation de liberté, je préfère être parfois vexante.
Sauf que je n'y peux rien. Et il y a un quart de seconde entre moi et les gens. Je parle en différé moi aussi. Je me censure très souvent. Je ne vaux pas mieux que les autres.
Ce quart de seconde, c'est celui de l'éducation, celui de la société humaine, celui des apparences et des faux-semblants, celui du lavage de cerveau parental. C'est celui de la civilisation, celui de l'expérience personnelle aussi. L'expérience des paroles qu'on a pris en pleine face, celle des mots qu'on a prononcé et qui ont fait du mal autour de nous. "Grande souffrance verbale sans l'intention de l'infliger".Votre réquisitoire monsieur le procureur ? Je vous condamne à un quart de seconde...
J'ai fait il y a pas très longtemps l'expérience douloureuse du quart de seconde entre moi et les gens. J'ai volontairement évité de dire ce que j'aurais dit spontanément. Et tout de suite m'est apparu la conscience coupable et confuse de ce que j'avais fait. Notez que ce n'était pas plus mal, la plupart des gens diraient que j'ai bien fait de ne pas faire cette remarque inutile, du genre qui fait rire un peu et qui fait du mal beaucoup. Mais je sais au fond de moi que ne serait-ce qu'il y a 2 ou 3 ans (4 et demi en fait pour être honnête), je ne me serait pas censurée.
A cet instant, au moment ou j'ai pris pleinement conscience du quart de seconde entre les gens, je me suis sentie triste. J'ai compris que j'avais grandi.
Le Quart de Seconde entre les gens, c'est le prix à payer pour être adulte. Et là je m'apperçois que j'ai beaucoup écrit "le quart de seconde entre les gens" dans cet article, j'ai comme un sentiment de redondance... Du coup, pour le fun, je vais en rajouter encore un : le quart de seconde entre les gens. Voilà.
3 commentaires:
Bah, personnellement, je suis pas encore adulte, mais même à 15 ans (bientôt 16, waiis :D) je trouve ça triste de devoir "m'auto-censurer".
J'aimerais toujours dire ce que je pense en premier, sans qu'on y accorde trop d'importance, ou même qu'au lieu que ça fasse mal, on se dise que je suis encore jeune et que je ne sais pas ce que je dis, que je ne réalise pas l'impact de mes paroles sur les gens.
J'y ai souvent pensé, je l'ai même mis à l'œuvre, et c'est sans doute hypocrite, parce qu'au fond, je sais ce que je dis et je sais que ça fait mal.
Et finalement ... je n'suis rien devenue de plus qu'une autre victime de ce que tu appelles "le quart de seconde entre les gens".
Bref, je comprends et je ressens aussi une certaine frustration lorsque je me rends compte de cette barrière invisible qui m'empêche de dire ce que je veux.
J'allais dire un truc, mais un foutu quart de seconde m'en a empêché...
*sors*
Betty. XD
(wais je viens squatter les commentaires \o/)
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