mardi 24 novembre 2009

Unchained Melody




"...et ses éclats de lys comme un velours blanc sur sa peau..."
Elle parlait en un songe, de ses mots naissaient les rivières de l'imagination, des flots d'images et des cascades de sons. Tout atour prenait la forme de sa voix, sur l'écran blanc de nos pensées ; laissant dériver au loin la réalité crue d'un salon de province pour éblouir de soleil nos rétines avides. Déjà le sable, de son chemin mouvant, avait envahi le sol, et de lui montait son odeur de chaleur, sa sensation de solidité sauvage et provisoire. On entendait au loin les hallalis des chasseurs lancés à la poursuite de leur proie palpitante. Et là, écarlate sous la douleur et l'angoisse, elle s'effondrait en un râle, sous nos regards avides d'en connaitre la suite. Une jeune fille couleur de lait, aux veines bleuies et empourprée de sa course, ses voiles tournoyant sous le vent du désert. Elle était là tandis que la voix racontait son histoire, elle nous faisait face comme la plus vivante de nos sœurs, sa chair pleine avait la densité de la vie, ses halètements courts raisonnaient aux oreilles de nos esprits, son regard nous transperçait alors que la conteuse décrivait l'éclat de ses yeux verts, et partout autour de nous, la réalité de son existence ne faisait aucun doute.
Mais la voix languissait et comme un tableau de sable livré au vent, on en vidait la substance et la table basse réapparut au milieu des dunes ensablées, les murs revinrent en vibrant autour de nous, et comme happés par le hameçon de la médiocrité, nous étions de retour dans nos vies. Elle s'était tue.



"Elle a un certain talent pour les histoires." dit sa cousine. Et elle reprit une part de tarte.